dimanche 27 avril 2014

Histoire pas drôle bis



La semaine dernière, j’étais sur mon ordi en train de travailler (si si !) quand la musique se coupe net. Merde une coupure de courant. Antoine saute dans la voiture et monte voir à Géophy ses instruments de veille, voir s’il y a un problème de ce côté là. A peine est-il parti que la sirène se déclenche. Un incendie ou tout au moins un exercice est en cours. N’ayant pas de rôle particulier, et n’ayant pas le feu au c**, je me rends au point de rassemblement (Totoche évidement) tranquillement.
Entre temps, j’ai allumé ma VHF et je suis le déroulé de la riposte. En trente secondes, l’information est passée, une cellule haute tension est en train de fondre, l’équipe d’intervention arrive rapidement sur les lieux et arrête le massacre. Bilan : toute la base est privée de courant pour l’après midi et une partie de la base sera probablement privée de courant jusqu’à OP2.
Cela nous fait réfléchir à la précarité de notre situation. Nous sommes à 3000km de la plus proche terre habitée (mis à part Crozet et Amsterdam) à 10 jours de navigation de la réunion. Nous sommes en totale autarcie pendant 5 mois, pour chaque problème, nous devons trouver la solution sur place et seulement avec le matériel présent.
Après étude du matériel à remplacer, nos électriciens ont trouvé une solution qui pourrait fonctionner pour réalimenter la partie HS. Cela nécessitera une coupure générale du courant et plusieurs jours de travail. Lors de cette coupure générale, je dois, pour ma part, m’assurer que les programmes scientifiques ne seront pas impactés. Nous allons donc mettre en place des groupes électrogènes portatifs sur les points clés. Notamment sur les congélateurs pour préserver tous les échantillons scientifiques ainsi que les installations de sismologie, de magnétisme,  de mesure des rayons cosmiques, de surveillance du niveau de la mer pour les alertes au tsunami…  Nous sommes loin de la stabilité et de la confiance qu’on peut avoir dans notre alimentation électrique de métropole. Chaque problème est une énigme à part en entière et c’est ça qui fait la richesse de nos expériences à Kerguelen.

En attendant que cela soit réparé, l’entrepôt IPEV est dans la zone sinistrée et nous nous retrouvons à faire nos courses dans le Kerfour avec la frontale. Nostalgie de cabane, quand tu nous tiens !

vendredi 25 avril 2014

Histoire pas drôle



Il y a 2 semaines, nous avons eu le plaisir d’accueillir Guy, navigateur en solitaire hollandais. Il est parti il y a 6 mois de hollande et arrivait d’Afrique du Sud après 15 jours de mer. Il reste parmi nous pendant une petite semaine avant de continuer vers l’Australie et finir son tour du monde.
Malheureusement, la météo de Kerguelen n’est pas la plus clémente de ce globe et le vent se levant, Guy cherchait la meilleure fenêtre météo pour repartir. Là dessus, une grosse dépression est arrivée avec des vents à 50 nœuds établis et 70nd (130 km/h) en rafale. Venant du sud ouest, il soulevait la houle dans tout le golfe du Morbihan et l’envoyait directement sur l’anse de l’antarctique juste devant la base, là où le navire était au mouillage. Après 2 jours à ce régime là, le coffre a lâché, s’est cogné contre l’étrave, l’endommageant sérieusement et le navire est allé s’échoué sur la plage du fond de l’anse.

Nos moyens étant limités, nous avons essayé toutes les solutions pour sortir le bateau de là mais la quille reste invariablement enfouie dans le sable. Cela fait donc 2 semaines que le bateau est échoué et que le marin séjourne parmi nous. La semaine prochaine, les grandes marées sont de retour.Nous allons réessayer de creuser un chenal devant, autour et sous le bateau pour lui permettre de se sortir à la seule force de son moteur. En attendant, une autre dépression nous arrive cette nuit avec encore 65 nœuds de vent en rafale. Va-t-il supporter ? Seul l’avenir nous le dira. Souhaitez-lui bonne chance !








Et une petite vidéo juste pour vous montrer la difficulté du cadreur à rester stable dans le vent!



jeudi 24 avril 2014

Happy from Kerguelen

Hi everybody !

Ca y est? le printemps arrive chez vous ? on commence à ressortir les tongues et le short ? Ici l’automne est assez clément. Puisque vous avez passé un hiver maussade, je suis certain que vous connaissez le clip de Pharell Williams « Happy ». Evidemment, on ne pouvait pas laissez passer ça! Vous pourrez donc admirer notre belle prestation sur le lien suivant :

Et si vous êtes sage vous en aurez peut être un deuxième!

See ya all !

dimanche 13 avril 2014

Highway to paradise : mon tour courbet

L’OP est à peine finie, me revoilà parti en manip. Je pars sur le tour courbet accompagner les Zornitho et en profiter pour faire un peu de tri, ménage et inventaire dans les cabanes. Cascades, Cap Cotter, Cap Noir, Ratmanoff puis Morne. En tout 120 km de marche pour faire le tour. On prévoit 12 jours de manip car nous avons du travail sur les gorfous macaronis à Cotter, sur les poussins de manchots royaux à Ratmanoff, et sur les grands albatros à Ratmanoff et Morne. Le programme s’annonce sympathique.

Jour 1
Jeudi 27 mars, premier transit, il fait beau mais froid. Nous avons 6h de transit pour rejoindre la cabane de Cascades, transit beau mais monotone. Nous croisons plusieurs souilles et rivières, le jour est beau, c’est agréable de marcher dans ces conditions. Après 5h de marche, nous grimpons au sommet de la citadelle qui surplombe la côte nord. Nous ne sommes plus très loin de la cabane. En redescendant de ce sommet, nous trouvons un poussin d’albatros fuligineux sur son nid. C’est une belle bête de la taille d’une grosse dinde ou d’un cigne avec un beau duvet gris. Il est encore jeune et ne s’envolera que dans un mois. Quelques minutes plus tard à quelques pas de la cabane, nous entendons un cri aigu inhabituel et nous voyons des mouvements dans l’acena. Après s’être rapproché, nous voyons un chat qui vient d’attraper un lapin. Malheureusement, il nous aperçoit, lâche sa proie et s’enfuit dans un terrier. Pas grave, on aura du lapin pour diner.

poussin d'albatros Fuligineux

Jour 2
Dès le petit matin à 9h, nous nous levons. La confiture de melon de maman fait des merveilles, et nous partons pour une balade vers l’anse Betsy. Nous croisons un bon nombre de pétrels géants et de nids de grand albatros. Ils ont l’air tout penaud à couver leur poussin sur leur nid. Mais quand ils passent à seulement quelques mètres au dessus de moi, ils font la même impression qu’un A380 en rase motte. 3m50 d’envergure pour 11kg, ils sont conçus pour planer dans des vents violents.
De retour à cataractes, nous faisons les sacs et partons pour Cap Cotter. Nous longeons la côte des gorfous dorés (véridique) et croisons une puis deux puis trois colonies immenses de gorfous macaronis. Je prends une véritable claque visuelle en arrivant en vue de Cap Rouge. Je ramasse une seconde claque auditive cette fois en me rapprochant. La colonie est à son pic de fréquentation car c’est leur période de mue et tous les maca sont de retour chez eux pour muer avant de repartir en mer pour tout l’hiver. Dans 2 semaines, il n’y aura plus aucun maca sur cette côte : difficile à croire alors qu’aujourd’hui j’ai du croiser près d’un million de maca et que je n’ai pas encore tout vu. Jamais 2 sans 3, je prends une dernière claque, olfactive cette fois ci lorsque je passe sous le vent de la colonie…
Tout le long du chemin, j’ai croisé des nids de grand albatros couvant leurs poussins. C’est mignon tout plein et eux au moins ne puent pas. Peu de temps avant d’arriver à Cotter, après une journée grisâtre, nous voyons le soleil descendre à l’horizon. Nous assistons alors à une explosion de couleurs extraordinaire. Le coucher de soleil sur la colonie de maca de Cotter est magique, inoubliable. Nous resterons 3 jours et 2 nuits ici afin de travailler sur les maca. Nous devons dé-équiper les maca porteurs de GLS (global localisation system : système de localisation du maca qui retrace son parcours et l’enregistre en interne). Il en reste 4 à retrouver mais nous n’en verrons qu’un seul. Que sont devenus les autres ? Mort en mer, marquage effacé et nous ne l’aurions pas vu, GLS perdu en mer ? La liste des raisons possibles de perdre l’appareil est longue mais le taux de récupération est excellent et les données ainsi récupérées sont des mines d’or. Nous devons également enlever le tesa aux maca qui en portent. Le tesa est un petit bout de scotch de couleur qu’on leur pose comme un brassard sur leurs ailerons pour les reconnaitre. J’ai donc la chance de tenir un maca dans les mains. Ces petites boules de plume sont extrêmement puissantes, leur bec est acéré et il vaut mieux ne pas se le prendre à même la peau. Et ils puent… atrocement… tout vêtement les touchant est voué à la poubelle !

coucher de soleil à cotter 2
coucher de soleil à cotter 

Jours 3 et 4
Cap Cotter, haut lieu gastronomique. La manip sur les maca prenant moins de temps que prévu, nous avons le temps de cuisiner. Voici donc les menus des repas pas forcément dans l’ordre :
Lapin à la moutarde, tourte au thon et marrons, tarte à l’abricot et chocolat, humus maison, gâteau au chocolat, risotto marrons et jambon, pizza, foie gras, gâteau poire chocolat, terrine de la métropole, gewurztraminer, vin chaud, fromage de brebis et comté et toutes sortes de pains gigantesques…
Ces 2 jours se passent dans le brouillard et nous n’avons pas d’occasion d’embrasser la côte dans son ensemble.

cabanes de cotter
grand albatros sur poussin
Jour 5
Départ pour Cap noir, le transit est magnifique, les paysages se modifient, les falaises s’élèvent, et se couvrent de cottula, on troque les maca contre des otaries, les grands alba sont dans les airs avec une quantité incroyable de cracou qui ont l’air ridicule à coté des grands alba malgré leur 1m80-2m d’envergure. D’après le comptage des ornithos, le mois dernier, il y a près de 8000 otaries sur cette côte. Nous assistons également à la parade de 2 grands alba. Les couples peuvent mettre plusieurs années à se former. La cour est impressionnante, belle et puissante à la fois. Quelle joie de pouvoir assister à tout ca. Le transit de Cataracte à Cap Noir est comme une balade dans un zoo, un safari austral, où l’ont peut admirer quantité d’espèces dans leur environnement naturel. L’arrivée à la cabane de Cap Noir au bord de la falaise, en plein milieu d’une colonie d’otaries est belle elle aussi. La nuit nous pouvons entendre les pups d’otaries (abréviation de puppies = les bébés) qui gémissent près de la cabane. Les rêves m’emportent doucement.

parade amoureuse de grand albatros

Jour 6
Départ pour le transit Cap Noir Ratmanoff, 6h de marche de prévue dans un brouillard dense et une traversée de rivière qui s’annonce sportive puisque nous ne serons pas loin de la marée haute. Nous partons dans la brume avec un fort vent… de dos donc tout va bien pour le moment. Le paysage change petit à petit, nous passons d’un plateau d’acena plongeant en falaise dans la mer à une cote découpée, des collines de cottula se succédant sur un rythme tranquille. La brume se dissipe sans pour autant laisser le soleil percer. Après une bonne heure de marche nous arrivons à Digby par les hauts. Nous surplombons alors les colonies de manchots royaux qui sont sur les plages encaissées. L’effet est impressionnant, on peut embrasser la totalité de la colo en un coup d’œil. Et bien que les colos soient plus petites que celle de rat, elles en paraissent plus grandes. On note également un nombre impressionnant de cracou qui attendent leur déjeuner. Vers 13h, on se trouve un coin à l’abri du vent pour casser la croute. Face à la mer et avec un combat d’éléphant pour nous divertir. Nous y resterons près d’une heure malgré le froid. Nous repartons direction le sud, le lac Marville et son fameux déversoir qu’il faudra traverser. Le Lac Marville est un gros lac (environ la moitié du lac d’Annecy) qui est séparé de la mer par une lagune large de quelques dizaines de mètres. Il vaut donc mieux se trouver à marée basse pour franchir son déversoir. Manque de pot, on y arrive tout juste une heure après la marée haute et le courant est fort, la profondeur … douteuse. Nous voyons un gros éleph jouer dans le courant et s’immerger complètement là où nous comptions traverser. Autrement dit, on va mouiller le caleçon. On quitte alors chaussures et pantalon, nous chaussons les crocs et cherchons un endroit où la profondeur reste correcte (sous la ceinture quoi). Finalement, j’en trouve un à quelques mètres de la plage, le courant est fort mais l’eau reste au niveau du caleçon. En 30 secondes tout le monde est de l’autre coté, finalement ce n’était pas si terrible que ca. Nous nous séchons et repartons. Le paysage change encore, les collines et falaises laissent place à de belles plages de sable noir. Nous avançons rapidement pour atteindre Rat et sa fameuse colonie de Manchots Royaux.

Jour 7
Il est 15h, nous avons fini de manger, de prendre le thé. Je suis derrière la vitre de la cabane et je contemple la colonie qui s’étend sous mes yeux. Elle aussi est à son pic de fréquentation mais pas pour les mêmes raisons que les maca. Les poussins de l’année (2/3 mois) sont déjà grands et forment des crèches autonomes. Quelques retardateurs sont encore en train de couver mais la plupart des adultes font de cours séjours en mer pour nourrir voir gaver leur poussin en vue de leur grand jeûne de l’hiver. Les 2 parents se croisent donc sur la colonie et c’est donc une plage remplie plus que jamais que j’ai sous les yeux.
Nous faisons ici une pause de 3 jours car nous devons travailler sur les poussins de manchots royaux et sur les grands albatros. Ce matin, nous avons équipé 33 poussins Royaux de brassards et étiquettes de façon à pouvoir les repérer et les suivre tout au long de leur croissance jusqu’à leur départ en mer en novembre. Les ornithos reviendront ici tous les mois pour les recapturer et les peser.
Ce matin j’ai donc eu droit à 20 câlins (il faut partager un peu) avec ces petites boules de plume toutes douillettes. Il nous en reste encore 17 à faire demain matin. Cet après midi, on profite du beau temps pour faire des photos, pécher et prendre une douche dans la rivière.

Le soir, une fois de retour à la cabane, nous préparons le repas. C’est une activité très prisée et après une semaine, chacun trouve son rôle facilement et c’est une entreprise bien huilée qui se met en route. Ce sera de la truite fraiche en papillote avec oignons et pommes de terre, humus pour l’apéro, et gâteau pomme chocolat en dessert. Un délice.

Jour 8
Ce matin, nous finissons le marquage des poussins Royaux. Nous assistons à une chose inédite : un poussin de 3-4 mois couve un autre plus petit qui n’a pas encore son duvet. En une heure, les 1è poussins sont faits. L’après midi, nous passons à la manip grand albatros. Il s’agit de contrôler les 25 nids répertoriés et de noter leur statut de reproduction : sont-ils en train de couver un œuf, un poussin ou ont-ils raté leur reproduction et ont quitté le nid ? La pluie se met de la partie, on décide de finir les 3-4 nids qui restent demain. Du coup on passe le reste de l’aprèm à lire et jouer aux cartes. Petite pensée à nos amis qui sont partis à OP1 et qui viennent d’arriver à la Réunion.

Jour 9
Aujourd’hui, le seul impératif qu’on a est de finir le contrôle des alba. On décide alors d’en profiter pour aller sur le mont Peeper, situé à quelques 10km à l’ouest de rat. Nous allons donc pique niquer là bas. Malheureusement la météo n’est pas avec nous et nous n’aurons pas une belle vue dans les nuages là haut. Nous mangeons tout de même puis redescendons. Arrivés à la cabane, nous nous faisons un bon chocolat chaud, bien mérité.

Jour 10
Départ pour Pointe Morne, dernière étape de notre périple. Le temps est magnifique, je paris sur le t-shirt pour le transit. Je mets même de la crème solaire. Malheureusement, le temps de faire des photos et de ranger et nettoyer la cabane, le ciel se couvre et je me rhabille en vitesse. Le transit est le même qu’en tracteur mais la vision du randonneur est tout autre et c’est avec grand plaisir que je marche sur ces côtes. Le temps passe vite, surtout lorsqu’on discute rando dans les Alpes et Pyrénées avec Flo. Nous voilà arrivés à Morne où Matthieu et Yves nous rejoignent en fin d’aprèm. Ils arrivent de PAF et viennent faire la manip grand alba avec nous. Ils ramènent une grosse quantité de viande avec eux, c’est vrai qu’on s’est un peu privé pendant cette manip. De plus, l’équipe popchat qui a quitté Morne le matin même nous a laissé de l’humus et du pain. Du coup on se lâche : apéro puis pizza, on commence à avoir le coup de main et l’organisation.

Jour 11
Les ornithos font le tour des nids pendant que je fais le tour de la cabane en prévision de travaux à réaliser. Et l’après midi, tout le monde les accompagnent pour faire les nids restants. La brume s’est transformée en bruine et c’est bien humide que nous rentrons à la cabane. Ce soir est notre dernier soir, demain nous rentrons sur paf.
Cette manip a été un pur bonheur. Cela m’a rappelé mes vacances de l’été dernier : le GR20 en corse. Le paysage changeait chaque jour, on mange bien, on marche bien, il y a une bonne ambiance et arrivé à la fin on n’a qu’une envie : recommencer.

manchot royaux à ratmanoff

manchotière de Gorfou macaronies le blanc sont les plumes de duvet

manchotière de royaux à cap Digby

mont Crozier

otarie